Page 7 - La boot dè sau - Cafè Suisse
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Préface


                    Jean Girardin a bien voulu me réserver l’honneur de préfacer
            cette plaquette. Je le fais avec d’autant plus de plaisir que je considère
            l’auteur comme l’un des meilleurs écrivains gaumais.
                    Qu’il nous parle des gens qu’il a côtoyés, de son village, de sa
            maison. des bêtes, des prés et des champs. des jours et des saisons,
            des  petits  chagrins  et  des  drames  de  la  vie,  Jean  Girardin  nous
            intéresse et nous émeut. Car, il ne suffit pas de bien connaître son
            dialecte,  il  faut  aussi  savoir  regarder.  comprendre,  ressentir  et
            exprimer avec son cœur.
                    Or, son dialecte. il le possède dans toutes ses nuances. Nous
            avons  souvent  disserté  sur  les  origines  de  tels  mots,  sur  leur
            signification, sur leur orthographe.
                    C’est sur ce dernier point que les avis divergent le plus, pour
            la bonne raison que les patois ne sont, en principe, que des langues
            parlées par les paysans. C’est fort tardivement qu’ils ont trouvé leurs
            prosateurs et leurs poètes.
                    Lorsque le français (dialecte de l’Île-de-France) supplanta toutes
            les langues d’oïl dans le nord et, plus tard, les langues d’oc dans le sud,
                                            e
            après la croisade des Albigeois (13   siècle), les dialectes employés par les
            écrivains tombèrent au rang de patois parlés et non écrits.
                    Ce n’est qu’au milieu du 19 siècle que la littérature provençale,
            une  des  plus  florissantes  littératures  dialectales,  renaîtra  avec  les
            félibres dont le plus célèbre est Mistral.
                    La difficulté d’orthographier les patois réside dans le fait que leur
            vocabulaire et même leur grammaire varient parfois d’un village à l’autre.
                    De même que les premières œuvres «littéraires» populaires,
            celles des trouvères et des troubadours, étaient orales parce que le
            peuple ne savait pas lire et qu’il se contentait d’écouter, les «œuvres
            littéraires»  en  patois  sont  le  plus  souvent  des  chansons,  des
            monologues et de petites pièces de théâtre qui se transmettent par
            tradition orale.
                    Le comique en est ordinairement le support. Ce n’est qu’au
            deuxième  stade  que  le  patois  déborde  de  son  cadre  paysan  pour
            donner des œuvres lyriques écrites qui expriment les sentiments des
            gens simples : autour de l’élue), de la maison, du village, etc., amitié,
            chagrins, regrets, joies...
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