C’est au grand oncle d’Omer Dejardin, Orner
Fontaine, que l’on doit La
tchansan des Gaumais
(1904), véritable hymne régional qui est toujours
à la une des fêtes et autres rassemblements
actuels,
estudiantins notamment. La musique est de Keyenberg, chef de musique
à l’Harmonie d’Étalle.
Cet antécédent et le contexte local ont sans
doute
balisé l’activité patoisante
d’un directeur
de laiterie coopérative qui s’imposait comme un
chef
d’entreprise prévenant, et
particulièrement
dépendant de l’activité paysanne.
Sportif, puis
organisateur d’épreuves internationales
à une
époque où la Gaume était encore
repliée sur
elle-même, il utilise l’écriture dans
tous ses
épanchements: Pendant
mon
service militaire, je composais une chanson par mois. Prisonnier
pendant dix mois en Allemagne, la feuille blanche restait un objet de
conquête ! Plus tard, on me contactait pour des
télégrammes de mariages, des textes de
chansonniers, des
flauves ou des poèmes occasionnels... En quelque sorte,
j’étais un "écrivain public" !
Omer Dejardin a participé activement à la
rédaction de Tourtous
assen,
la publication trimestrielle du S.I. du grand Étalle:
chroniques
de la guerre 14-18, souvenirs sportifs liés au village,
poèmes eux-mêmes chargés de souvenirs
anecdotiques
locaux. II faut se rapprocher le plus
possible du français. Pour être lu, il faut aller
vers le lecteur.
En fait, cette ambition, cette activité patoisante
– au
même titre que la confection de tapisseries minutieuses
–
ressortent d’un ciselage salvateur, à un
âge ou
après avoir tant vécu il importe de se valoriser
en
s’investissant, de se souvenir en racontant.
Décidément, rien ne résiste
à
l’épreuve du temps: le passé, le
patois, ...
bousculent tous les protocoles, ressurgissent (sa plus grande
production date des années ‘70) des cheminements
les plus
touffus. Et ce n’est pas une renaissance quelconque: la
chaleur,
la sympathie, l’accompagnent comme une leçon
impossible
à oublier ! Dans la
poésie
d’O. Dejardin, il faut noter le ciselage des alexandrins, et
les
terminaisons en «ang», «ong»
propres aux
anciens d’Étalle.
(In La
poésie actuelle en patois gaumais, par Jean
Joannès, La Joyeuserie, 1992. |