Page 6 - Marcel Moreaux-oeuvres-1
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maison paternelle... Derrière le rideau de la fenêtre, sans qu’il pût les voir,
sa mère et sa sœur pleuraient à chaudes larmes.
A l’école, Marcel était un bon élève. Son maître l’appelait (déjà) le
petit poète. Et celui-ci trouvait matière à exercer son talent, surtout en
famille, le jour de l’an. Il aimait raconter la visite à grand-mère, à
laquelle, avec sa sœur, il allait souhaiter la bonne année. C’était l’occasion
de déployer la lettre décorée de fleurs et de lire les souhaits éloquents à
l’aïeule qui ne pouvait dissimuler son émotion. Dix sous, enveloppés dans
un coin de journal, étaient la récompense de tant de gentillesse. Mais tout
le monde n’accueillait pas les enfants avec la même affabilité. N’était-ce
pas au temps de son enfance scolaire qu’il composa la ritournelle du «Noir
Café» encore bien souvent répétée aujourd’hui? Un oncle pas toujours de
bonne humeur, s’était contenté d’offrir aux enfants, en guise de remer-
ciements pour les vœux, une tasse de jus noir dont ils n’étaient pas fort
friands. Et c’est sur le chemin du retour, sautillant et chantonnant à son
habitude qu’il aurait adapté spontanément sur un rythme endiablé, les
paroles de l’offre du café :
T’a-n arès
T’‘a-n arès
T’‘a-n arès du noir cafè ...
Et les jeunes, bien souvent dans la suite, se sont amusés à scander ces
quelques syllabes vives et rapides, plus entraînantes qu’une marche
militaire.
Une enfance heureuse se terminera au petit café de Sainte-Marie où,
par ses réparties, il a si souvent réjoui les clients de passage.
Dès le milieu de 1915, le service des tranchées est organisé, malgré les
imprévus des attaques et des bombardements. Il faut veiller au moral du
soldat, l’aider à supporter l’absence et les privations de toutes sortes. Dans
chaque régiment se crée une petite troupe théâtrale et l’on permet aua
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